Quand je repense à mes voyages en Italie, il y a un plat qui revient toujours comme une madeleine de Proust : les bucatini all’amatriciana.
Une assiette fumante, parfumée au guanciale croustillant, relevée de piment, enrobée de sauce tomate brillante, et saupoudrée de pecorino romano râpé… C’est un concentré d’Italie qui, pour moi, raconte autant une histoire que le goût d’un territoire.
Depuis mon expatriation à Marrakech, je prends un plaisir fou à refaire ce plat chez moi, et à le partager avec mes proches. Mais au-delà de la simple recette, je voulais t’emmener dans un voyage culinaire : comprendre l’origine de ce mets romain, ses secrets d’exécution, ses petites variations et son importance culturelle.


L’article en bref 💡
➕ Recette traditionnelle des bucatini all’amatriciana et ses ingrédients incontournables
➕ Histoire du plat : d’Amatrice aux trattorie de Rome
➕ Secrets de cuisson et astuces pour réussir la sauce comme en Italie
➕ Variantes modernes et adaptations maison
➕ Accords mets-vins, adresses et inspirations culinaires
L’origine des bucatini all’amatriciana
De la « gricia » à l’amatriciana
Avant d’être tomate, l’amatriciana fut blanche ! Les bergers des Apennins préparaient un plat nommé gricia (pâtes, guanciale, pecorino, poivre), considéré comme l’ancêtre de l’amatriciana.
La tomate, arrivée d’Amérique, fut intégrée au XVIIIe siècle, donnant naissance à la version rouge que l’on connaît aujourd’hui.
Amatrice, berceau du plat
Le village d’Amatrice, dans le Latium, revendique la paternité de cette recette. Aujourd’hui encore, chaque année en août, une grande fête populaire y célèbre les Spaghetti all’amatriciana (car oui, historiquement, c’était avec des spaghetti, et non des bucatini !).
Rome, l’adoption urbaine
Si Amatrice est le berceau, c’est Rome qui a fait rayonner l’amatriciana dans le monde entier. Les trattorie romaines l’ont adoptée en remplaçant les spaghetti par les bucatini – ces pâtes percées en leur centre, parfaites pour piéger la sauce.
Les ingrédients incontournables
L’amatriciana est un plat trompeusement simple : peu d’ingrédients, mais une exigence extrême sur leur qualité.
Le guanciale, l’âme du plat
Oubliez la pancetta, encore moins le lard. Le guanciale (joue de porc séchée) est la star : gras fondant, goût profond et fumé, croustillant une fois poêlé.
👉 Astuce : si tu es à Marrakech comme moi, on peut parfois le trouver dans certaines épiceries italiennes spécialisées.
Le pecorino romano
Fromage au lait de brebis, salé et corsé, qui vient équilibrer l’acidité de la tomate.
👉 Ne pas le remplacer par du parmesan : l’identité du plat s’en trouve changée.
La tomate
Traditionnellement, ce sont des tomates pelées San Marzano. Leur chair sucrée et peu acide donne une sauce équilibrée.
Le piment
Juste une pointe pour relever, pas plus.
Les bucatini
Ces pâtes longues et épaisses avec un trou central. Leur texture rustique résiste à la sauce et rend chaque bouchée généreuse.
La recette pas à pas
Étape 1 : préparer le guanciale
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Couper en lanières épaisses
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Le faire revenir à feu doux, sans huile, jusqu’à ce qu’il soit croustillant et que le gras ait fondu
Étape 2 : la sauce
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Retirer le guanciale, garder le gras dans la poêle
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Ajouter le piment puis les tomates pelées écrasées
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Laisser mijoter doucement 15-20 minutes
Étape 3 : cuire les bucatini
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Dans une grande casserole d’eau salée
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Cuisson al dente (toujours !)
Étape 4 : assemblage
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Mélanger pâtes + sauce + guanciale croustillant
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Ajouter généreusement de pecorino râpé
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Servir bien chaud
Les secrets pour une amatriciana réussie
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Ne jamais ajouter d’oignon (sacrilège à Amatrice !)
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Cuire le guanciale doucement pour libérer son gras sans le brûler
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Toujours garder une petite louche d’eau de cuisson pour lier la sauce
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Utiliser un pecorino romano affiné (pas trop jeune, pas trop sec)
Variantes et adaptations
Amatriciana romaine vs Amatrice
À Rome, certains ajoutent un peu d’oignon. À Amatrice, c’est interdit.
Bucatini vs spaghetti
Les puristes d’Amatrice défendent les spaghetti. Les Romains adorent les bucatini. Les deux sont acceptés, mais l’expérience change.
Adaptations maison
Quand je ne trouve pas de guanciale à Marrakech, j’avoue parfois le remplacer par une pancetta de bonne qualité. Mais rien ne vaut l’original.
Accords mets-vins
Un plat si romain mérite un vin italien :
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Montepulciano d’Abruzzo : rond, fruité, parfait avec la sauce tomate
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Chianti Classico : plus corsé, il met en valeur le gras du guanciale
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Pour les amateurs de blanc : un Frascati sec, léger et frais
L’amatriciana dans le monde
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Aux États-Unis, elle est souvent servie avec des penne ou rigatoni
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En France, beaucoup la confondent avec une simple sauce tomate au lard
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Au Japon, elle est très populaire dans les cafés italiens
Ce que je trouve fascinant, c’est de voir comment une recette de bergers s’est universalisée.
Où manger une vraie amatriciana ?
En Italie
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Armando al Pantheon (Rome) : une institution
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Da Felice (Testaccio, Rome) : amatriciana crémeuse et gourmande
À Marrakech
On trouve quelques adresses italiennes qui la proposent, même si pas toujours fidèle à la tradition. Personnellement, je préfère la cuisiner à la maison.
Mon expérience personnelle
Quand j’ai fait l’amatriciana pour la première fois à Marrakech, j’ai eu du mal à trouver certains ingrédients. Mais c’est devenu un rituel : une fois par mois, je prépare ce plat, je sors une bonne bouteille italienne, et je ferme les yeux. Instantanément, je suis transportée à Rome, entre Trastevere et Campo de’ Fiori.
Les bucatini all’amatriciana ne sont pas qu’une recette. C’est un morceau d’histoire, une tradition, un goût de terroir qui traverse les époques. Chaque assiette raconte l’histoire d’Amatrice, des trattorie romaines, des familles italiennes et des passionnés de pasta comme moi qui la refont loin de l’Italie.
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